Dimanche
[1]
Mon Cher Vieux,
Je reçois à l'instant ta longue lettre
[2] que j'ai eu peine à déchiffrer l'ayant lu au lit; j'ai eu trois attaques cette semaine; je suis désolé affreusement de cela; cela en effet c'est l'estomach mon cher vieux, la pourriture cancéreuse dont nous crevons tous du côté maternel. En attendant me voici tout heureux de tant de choses que tu me dis et quel bon travail tu auras fait là bas! j'ai reçu l'épreuve "nieu et strachs"
[3] ce sera superbe mais que croire de Buschmann; penses-tu vraiment à du ressentiment de sa part; cela me semblerait énorme, je crois plutôt à une bêtise totale jointe à un manque d'outillage, puis aussi l'idée qu'il aura à recevoir des engagements tous les mois.
[4]
Quant à ton aventure à la Société Ste Augustine c'est un rêve de crétinerie, mais qui me semble merveilleux comme esprit! Penses donc des lettres consacrées et
qui ne peuvent être polluées! c'est grandiosement coffard tout de même!
[5]
"Salutations" est fini (lis toutes les pièces écrites); à présent je vais commencer le grand travail de Pénélope et byzantiniser tout cela; je rève beaucoup paraître au mois de Mai, Mois de Marie ce qui serait amusant. Dans tous les cas j'ai encore pour 2 ou 3 mois d'ouvrage.
[6]
Mais cher vieux j'ai bien autre chose en tête voici: j'ai trouvé je crois une machine en vers absolument personnelle (pas trop longues) et pour les peintres seulement! J'ai deux trois choses déjà de faites et je crois cette fois avoir trouvé une trouvaille.
Il y aurait une 300-taine de vers tout au plus, on tirerait à 50 exemplaires autant de peintres qu'on aime et avec noms de ceux-ci sur chaque exemplaire. Ce serait je le répète absolument pour les peintres et je voudrais ne pouvoir être compris que par eux.
[2]
Alors que penses-tu d'une collaboration avec moi et linéaire!
Quant aux "Salutations" à moins que tu n'aies travaillé déjà, je crois qu'une couverture comme pour "Dominical" et un cul-de-lampe au revers serait suffisant — car crois bien depuis que j'ai l'autre machine en tête, "salutations" n'est plus qu'une toute petite chose bien nulle pour moi; tandis que l'autre réalise la légende qu'un jour nous avons rêvé illustrer ensemble.
[7]
Ne crois pas que je lache "Salutations" au contraire; je m'acharne à finir pour enfin arriver à l'autre machine qui me sera un repos et chose si délicieuse à faire que j'en rêve tout éveillé. —
Mais d'abord "salutations" c'est la corvée puis comme un paradis le tout petit livre que je rêve avec toi et en toi. Que penses-tu De Ceci, cher vieux? si tu n'es pas trop loin dans l'illustration de "salutations" pense moi une belle couverture et format comme tu l'as trouvé pour "dominical".
Brutalement, n'est ce pas, je t'emprunte mon bon vieux, une somme énorme de bon vouloir et d'affection pour ce que je fais; mais je sais que tu veux bien car, vrai, tu travailles avec moi plus que tu ne le penses et sans notre amitié si longue je n'aurai pu, car tu m'as enseigné les choses de la vue et ton âme aussi beaucoup que j'ai très mélangé dans du coeur que j'avais.
Mon père
[8] et ma soeur
[9] sont absolument épatés de mon application; ma soeur m'engueule, mon père me soigne et s'intéresse d'une façon un peu gênante parfois à ce que je fais. Or, mon bon vieux, j'ai vu le grand cabottin
le sar,
[10] dont la conférence a été
très bien mais l'homme!
Un costume ainsi, à peu près celui d'un dompteur; puis à la signature du livre d'or une page tout entière comme Léopold II.
à propos te souvient-il de ta mention au dit livre lors de ta conférence:
[11]"Le public du cercle me semble prendre les conférences comme une purge". Monsieur
Cattier a fait de l'esprit et mis dessous ta signature:
"Mais non, mais non"
(signé Cattier)
C'est superbe hein, comme platitude hein! ce Monsieur qui touche les 100 frs à toi promis!
[3]
à Samedi, mon bon vieux, je t'écris dans mon lit tâche de me lire et très décousu mais à toi tout plein
Max
Ai vu
Vermeylen hier qui part pour la Hollande,
[12] toujours emballé et très du prospectus.
Tibissime
Max
Annotations
[1] I.v.m. de datering op 13 november 1892: op het einde van de brief schrijft
Elskamp dat hij de dag voordien
Vermeylen heeft gezien, voor hij naar Nederland vertrok. In
brief 199 van 11 november 1892 meldde
Vermeylen inderdaad dat hij in Antwerpen o.a.
Max Elskamp zou bezoeken voor zijn vertrek naar Nederland. Zijn reis zou duren van 13 tot 23 november: zie o.m.
brief 200,
brief 205 en
brief 211. Bovendien schrijft
Elskamp op het einde van de brief:
'à Samedi', i.e. 19 november 1892.
Van de Velde zal dan in Antwerpen zijn, komende uit Knokke, o.a. om zich met
De Bom te beraden over de moeilijkheden met Buschmann. Zie
brief 205.
[6] Van
Salutations, dont d'angéliques was reeds sprake in
brief 58primo,
brief 117ter en
brief 176primo. De bundel is inderdaad begin mei 1893 verschenen. Zie
L'art moderne, XIII, 19 (7 mei 1893), p. 147:
'Accusés de Réception: Salutations, dont d'angéliques, par Max Elskamp, rehaussées à la couverture d'une ornementation par Henri van de Velde; Bruxelles, P. Lacomblez.' In
L'art moderne van 14 mei 1893 (XIII, 20, p. 155) verscheen ook een niet ondertekende bespreking van het boek.
[7] Dat plan is, voor zover bekend, niet doorgegaan.
[8] Louis Jan Frans Elskamp.
[9] Maria Joanna Antonia Elskamp.
[10] Elskamp bedoelt
Sâr Josephin Péladan, die een voordracht gaf in Antwerpen in de
Cercle Artistique op woensdag 9 november, met als titel:
'De l'Amour, de l'art, du mystère'. Zie
de Koophandel van Antwerpen van 9 november 1892 (p. 3).
[12] Vermeylen was in Nederland van 13 tot 23 november 1892. Zie ook
[1].